Espagne
2022 80 mins
V.O. espagnole/coréenne
Sous-titres : anglais
Avec ses murs couleur Pepto Bismol et ses éclairages tamisés, le dernier film d’Eduardo Casanova présente une relation toxique entre une mère et son fils. Les plans ouvertement composés et les couleurs hyperréalistes évoquent un monde de fantaisies gomme balloune élaborées, dans le style des comédies musicales de la MGM et des telenovelas. Pourtant, ce monde parfait cède rapidement la place au grotesque. Assis l’un en face de l’autre dans un plan parfaitement symétrique, Libertad (la grande Ángela Molina, fréquente collaboratrice d’Almodovar qui a joué l’une des Conchitas dans le chant du cygne de Bunuel, CET OBSCUR OBJET DU DÉSIR) interroge son fils, Mateo (Manel Llunell) à propos de ses selles. La scène progresse et les deux se mettent à vomir violemment à travers la pièce, un incident qui mène au diagnostic d’un cancer et à l’emprise déjà stricte de Libertad qui se resserre de plus en plus autour de la liberté de son fils adulte.
Produit par nul autre qu’Álex de la Iglesia, LA PIETÀ atteint des sommets d’émotion de plus en plus extatiques dans un mélodrame d’horreur de l’une des étoiles montantes du cinéma bizarre en Europe. Souvent présenté comme le John Waters espagnol, le réalisateur Eduardo Casanova ne recule pas devant le repoussant alors qu’il fusionne une esthétique high camp à des images brutales de gore, de sexe et de fluides corporels. Cauchemardesque conte de fées sur le pouvoir et le contrôle, LA PIETÀ embrasse la direction artistique excessive tout en explorant la prise de pouvoir d’une mère devenue folle. Avec son humour noir et le dégoût provoqué, LA PIETÀ pousse à l’extrême le stéréotype de la mère autoritaire en brouillant la frontière entre Libertad (dont le nom signifie ironiquement liberté) et la dictature nord-coréenne. Cette allusion finit par s’infiltrer dans la réalité du film, brouillant encore davantage la frontière entre le réel et l’irréel. – Traduction: Stéphanie Cusson